Hier, c’était la journée des droits de la femme. Je ne vais pas revenir dessus car chaque année je suis très agacée par la manière dont cette journée est récupérée à des fins marketing, on oublie si facilement que cette journée existe pour lutter contre les inégalités, et on sait qu’elles sont nombreuses dans le monde entier et dans notre pays.
Tellement nombreuses qu’il serait difficile de toutes les évoquer et on n’a même pas idée à quel point la touche tous les domaines.
Il y a quelques mois on m’a fait parvenir un livre concernant le sujet du VIH, comment il est vécu par les femmes. Il est écrit sous formes de recueil de témoignages de 10 femmes atteintes ou qui luttent contre la maladie: patientes, docteurs, membres d’associations.
J’y ai appris énormément de choses, non seulement au sujet de la maladie, la manière de la soigner aujourd’hui (qui a beaucoup évolué au cours des dernières années), et surtout sur le fait qu’elle est vécu d’une manière très spéciale par les femmes.
En effet, les femmes ne vivent pas la maladie de la même manière que les hommes. Différentes causes à cela, et entre autres le fait que les femmes souffrent particulièrement d’effets secondaires invalidants.
Les essais cliniques des médicaments sont fait essentiellement sur… les hommes. On formule donc des traitements pour des hommes de 80 kilos en moyenne et on ignore totalement le fait que les femmes ont cette particularité d’être sujettes à des variations hormonales importantes.
Elles subissent donc des intolérances importantes (troubles métaboliques, nausées, diarrhées invalidantes…) car les doses ne sont pas modulables en fonction du poids et du métabolisme. J’ai été atterrée par la lecture de certains témoignages à ce sujet. Je vous en donne un extrait, de la part d’une femme qui confiait à son médecin son incompréhension face à une prise de poids incontrôlable à la suite de la prise d’un nouveau traitement:
« Madame, faites un régime. Vous les femmes, vous aimez les régimes. et si vous ne perdez pas de poids, essayez de vous souvenir que vous êtes en vie et que c’est ça qui compte ».
Ce phénomène d’anomalies de répartition du tissu adipeux s’appelle la lipodystrophie et c’est un effet secondaire reconnu. Vous imaginez bien que c’est terriblement difficile à vivre dans notre société où l’image est si importante, les conséquences sont non seulement psychologiques (baisse d’estime de soi), mais aussi affectives, sociales et thérapeutiques: en perdant confiance en son traitement, la femme peut le délaisser.
Les femmes sont représentées dans les essais cliniques de 5 à 10%… hallucinant n’est-ce pas ? Mais elles peuvent fausser les résultats car elles… peuvent tomber enceintes. Les patientes se heurtent donc à un mur lorsqu’il s’agit de communiquer sur les effets secondaires indésirables avec leur médecin. Qu’elles s’estiment donc heureuses d’avoir un traitement.
Je vous conseille la lecture de ce livre, très facile d’accès et qui permet d’apprendre beaucoup de choses sur la face cachée de l’épidémie, vécue par les femmes, sans tabou.
On se rend compte des difficultés qu’elles rencontrent non seulement dans leur vie personnelle mais aussi vis à vis du corps médical. Les médecins et gynécologues ne sont parfois tout simplement pas formés à suivre une femme contaminée. Le risque: prescrire des médicaments non compatibles avec les antirétroviraux, ou encore le non respect du rythme de surveillance spécifique à sa condition.
Souvenez-vous des campagnes de sensibilisation, elles ont largement été adressées aux hommes et notamment des toxicomanes et homosexuels. La conséquence aujourd’hui: une « féminisation » de la maladie qui, en France, compte parmi les nouveaux cas de séropositivité 32% de femmes. La plupart d’un certain âge, passées la quarantaine ou cinquantaine, qui se retrouvent dans des situations à risque après une séparation. Typiquement une population qui est passée à côté des messages de prévention.
Je vous invite vivement à découvrir les témoignages de ces femmes, fort intéressants.
10 femmes contre le SIDA, de Hélène Cardin et Cathy-France Ziouar 14,90€ , disponible sur Amazon.
« Au fond, bien que ce soit consternant d’avoir à l’admettre, les complications de prise en charge auxquelles les femmes séropositives doivent faire face ne sont que le reflet de tout ce qu’elles ont en général à subir par ailleurs, quand il est question du respect de leurs droits fondamentaux. La question de la discrimination envers les femmes n’est réglée dans aucun domaine, pourquoi donc le serait-elle dans celui du sida qui, tout au contraire, tend à la renforcer ? « .
6 commentaires
Merci pour ce billet, qui m’a déjà appris plusieurs choses que j’ignorais sur la maladie. Je vais voir pour me procurer le livre, bien que j’imagine que sa lecture va être difficile émotionnellement parlant…
Alors en fait pas du tout « dur » comme on pourrait effectivement le croire. Les témoignages ne font pas du tout dans la victimisation, même du côté des femmes malades. Du coup il y a un certain recul, le but est de démontrer ce qui est compliqué pour elles au quotidien et ce qui pourrait être amélioré.
j’apprends des choses et pas très belles, encore une fois :(….
Ah ça…on ne se rend pas forcément compte mais il y a encore beaucoup de chemin à faire pour défendre les droits des femmes et leur « traitement » dans notre société !
très intéressant j’ai appris beaucoup de choses tu m’as donné envie d’en savoir davantage.
tant mieux alors ! c’est le but 😉